Comment seraient nos communautés si l’homme devenait poly

Cet article fait suite à la question d’Uréthane [e-pseudo d’un de nos membres].

“Comment seraient nos sociétés si on devenait tous poly ?”

D’abord, il faut se mettre d’accord sur ce que “poly” signifie. Il n’y a pas véritablement de définition figée du terme, à ce jour. Mais on suppose que, dans sa question, Uréthane parle d’une société dans laquelle chacun serait libre d’entretenir des rapports sexuels et affectifs avec plus d’une seule personne. Bref, disons qu’il évoque une société dans laquelle la vie intime ne se partagerait pas nécessairement à deux de manière exclusive, mais avec un nombre a priori indéfini de personnes et de manière inclusive.

Sur cette base, je dirais qu’il existe des sociétés lointaines ou éteintes qui adopt(ai)ent des rapports affectifs et sexuels qui sortent de l’idée qu’il faut être “en couple” pour avoir une vie sexuelle ou une vie affective. Ces sociétés peuvent nous donner des indications sur ce à quoi pourraient ressembler nos rapports sociaux si nous étions ici tous “poly”. Mais il faut nuancer. Les contextes économique, technologique, politique, religieux, architectural et environnemental de ces sociétés sont bien différents des nôtres. Si bien que leurs façons de se comporter les uns par rapport aux autres dans la vie quotidienne sont difficilement transposables ici aujourd’hui.

Ensuite, j’ai envie de préciser que l’homme ne devient pas poly. Tous les humains peuvent potentiellement ressentir un émoi amoureux (pour une ou plusieurs personnes). Tous les humains peuvent potentiellement ressentir une pulsion libidineuse à l’égard de qui que ce soit. Tous les humains peuvent potentiellement entretenir avec plusieurs personnes des liens que nous appellerions ici aujourd’hui “intime“. Techniquement (si je puis dire), on sait que tout cela est possible. Mais on sait aussi que tout cela n’existe pas sans l’intervention de la société (le groupe d’humains avec lequel chacun partage sa vie) et l’intervention de la culture (ce que ce groupe mobilise comme idées et comme objets).

Par exemple, on rapporte que chez les Inuits, la permissivité sexuelle et les formes de cohabitation variaient selon les saisons. En été, les familles (groupes restreints de type couple avec enfants) vivaient géographiquement distantes les unes des autres. En hiver, le clan (groupe élargi rassemblant les membres d’une même communauté) se rassemblait et adoptait une sorte de communisme sexuel.

Dans une société donnée, les comportements amoureux, sexuels ou l’habitat peuvent également varier au cours des périodes de la vie. Par exemple, chez les Murias (société indigène d’Inde), à l’adolescence, les jeunes du village sont obligés de passer leurs nuits dans le dortoir des adolescents. Là, les jeunes régulent eux-mêmes leurs propres façons de vivre leurs premiers émois, avec l’obligation de changer régulièrement de partenaire. Ces jeunes passent leurs nuits dans ce dortoir jusqu’à ce qu’ils se marient (vers 20 ans) avec un partenaire d’un autre village que leurs parents ont choisi pour eux. On le voit, la diversité des organisations humaines est grande. Et nos concepts occidentaux de famille ou d’intimité ne sont pas nécessairement transposables ailleurs. Inversement, des concepts d’ailleurs ne sont pas nécessairement transposables ou intelligibles à notre monde moderne contemporain (qu’on se sente “poly” ou pas). Cela, essentiellement parce que les façons de vivre, les rapports sociaux (y compris les rapports dits intimes) sont entrelacés à une multitude d’autres facteurs sociaux et environnementaux pour former habituellement un tout subjectivement et collectivement cohérent.

Par exemple, on peut voir dans la rubrique vidéo de notre site un reportage parlant des Mosos de Chine himalayenne (notons que le documentaire est ‘orienté’ et ‘partiel’… mais bon, c’est la loi du genre télévisuel). Les Mosos sont connus pour faire l’amour avec qui ils le souhaitent (du moment que le partenaire sexuel est consentant). Traditionnellement, les Mosos ne se marient pas. Les maisonnées sont composées typiquement d’une mère, de ses enfants adultes (frères et soeurs) et des enfants des soeurs. Chez les Mosos, il n’y a principe ni “père” ni “mari”. Et ce sont ce que nous appelons les “oncles maternels” qui collaborent à la vie de la maisonnée, y compris à la prise en charge des enfants (nés de leurs soeurs). Les échanges affectifs et sexuels tels que pratiqués par les adultes mosos sont rendus possibles là-bas grâce, entre autres, à trois éléments socioculturels importants que nous ne partageons pas avec eux.

Primo, leur mode de vie est basé sur des cellules familiales multigénérationnelles (plutôt gérées par les grand-mères) qui sont aussi des cellules économiques pratiquant un peu d’élevage, d’agriculture et de commerce.

Secundo, les maisonnées sont construites de façon à ce que chaque femme ait sa chambre et que celle-ci donne sur l’extérieur (en principe, les Mosos, ne font l’amour que la nuit et les amants qui rendent visite aux femmes ne sont pas autorisés à “prendre le petit-déjeuner” sur place).

Et tertio, la régulation sociale de la sexualité de type moso est possible grâce à des croyances collectives liées à la procréation bien différentes des nôtres. C’est-à-dire que les Mosos pensent que les femmes portent “d’avance” les enfants en elles (selon une intervention divine) et que le sperme de leurs partenaires masculins est une sorte d’engrais fertilisant qui fait pousser les bébés. En d’autres mots, les femmes sont le “terreau” et elles portent en elles les “graines”, tandis que les hommes en visite, eux, sont comme la pluie et se contentent “d’arroser”.

On le voit, chez les Mosos, on est très loin du catholicisme où les époux ne forment qu’une seule chair pour toujours. Et on est très loin aussi de nos cours de biologie où il faut des gamètes mâle et femelle qui s’associent dans une proportion 50/50 pour former le patrimoine génétique d’un nouvel être. Du coup, les Mosos s’en fichent un peu du concept de “géniteur”. Alors que pour nous, savoir qui est le géniteur est une préoccupation importante. Donc, en ce qui nous concerne aujourd’hui, je ne suis pas sûr que les poly occidentaux laisseraient tomber le concept de “père” (voire celui de “mari”) et pourraient (ou voudraient) “oublier” leurs connaissances génétiques et l’importance culturelle qu’elle revêt à leurs yeux (sur cette question, je suggère, entre autres, d’écouter l’émission radio polyplaisir des utopies consacrée à Ularel et Marion -partie 2/2).

Ici aujourd’hui, le modèle (monogame) présenté comme l’idéal social veut que les quatre éléments suivants la sexualité, l’affectivité, l’espace domestique et l’éducation des enfants se partagent à deux personnes, rien qu’à deux, et de manière durable. Ce qui apparait normal chez nous aujourd’hui aux yeux du plus grand nombre peut, me semble-t-il, se résumer symboliquement par la conjonction suivante.

[ (sexe+affection+maison+enfants) <=> ( (Il+Elle)*pour toujours) ]

Cela signifie qu’il est attendu d’un couple monogame (Il+Elle) de s’associer pour toujours (ou pour le plus longtemps possible) pour vivre ensemble sous le même toit en étant exclusif quant à l’affection, la sexualité et la prise en charge des enfants.

Bien sûr, on n’a pas attendu les polyamoureux pour que des gens se demandent pour eux-mêmes si le schéma traditionnel leur convient.

Par exemple, les divorcés ont laissé tomber le [pour toujours] de l’équation, mais se retrouvent souvent avec des difficultés de type maison. Les promoteurs du mariage homosexuel ont, eux, remplacé le [Il+Elle] de la formaule par [Il+Il] ou [Elle+Elle]. Ensuite, les libertins s’agencent des parenthèses dans le temps et dans l’espace où ils dissocient le partenaire affectif du partenaire sexuel, etc.

Ainsi, pour répondre, autant que je le peux en quelques lignes à la question d’Uréthane, si nos sociétés étaient poly, la façon dont on élève les enfants serait probablement différente: on leur raconterait d’autres histoires; on transmettrait d’autres messages aux adolescents qui découvrent les enjeux de la sexualité; les personnes qui seraient impliquées dans l’éducation des enfants et qui subviendraient à leurs besoins vitaux seraient différentes de ce qu’on voit traditionnellement aujourd’hui; les maisons seraient probablement construites autrement, la religion dominante ne serait probablement pas le catholicisme, les lois et décrets seraient rédigés autrement (notamment en ce qui concerne le mariage, l’adoption et l’héritage, mais aussi la taxation des ménages, l’urbanisme…), les processus décisionnels au niveau collectif évolueraient, les habitudes de solidarités seraient différentes (notamment concernant le partage des tâches, le partage des ressources, la transmission des biens et des idées à la génération suivante…). Ce qui est secret ou ce qui est drôle serait différent de ce qui doit être secret ou de ce qui est drôle au regard de la plupart des Occidentaux d’aujourd’hui.

Bon, je reconnais que c’est vague. Mais (a) c’est très compliqué de décrire une société (a fortiori sur un forum de discussion); (b) même s’il y a des tendances qui se dessinent, tous les poly ne sont pas d’accord entre eux sur les grandes lignes politiques à adopter en matière de vie en commun; et (c) même si tous les poly étaient d’accord pour dire par exemple que la sociocratie est ce qu’il faut faire, il n’est pas certain que cela marcherait à grande échelle.

Voilà, 🙂

Maurice.Morris

[avertissement: les définitions présentes sur cet article ne prétendent pas avoir un caractère scientifique et se veulent uniquement vulgarisatrices]

Article en lien ici sur le forum

12 Replies to “Comment seraient nos communautés si l’homme devenait poly”

  1. Si je ne me trompe pas, S. Moscovici disait que les changements sociaux étaient le fait de minorités. Il parlait d’écologie politique je crois.

    Selon moi, l’écologie, même au sens large, n’est viable que si on commence par la remise en question des relations humaines et notamment des relations amoureuses. Je ne sais pas si le polyamour s’avèrera être une solution globale possible mais c’est encore une minorité, donc… on peut rêver.

    Merci Maurice pour nous avoir fait partager le fruit de ta réflexion.

  2. Il y a beaucoup de notions très intéressantes dans le paragraphe introductif.

    Particulièrement l’idée que la société façonne les rapports entre les gens et que l’organisation sociale est le fruit de choix politiques.

    Par contre je trouve bizarre de devoir partir en Chine ou dans le grand Nord pour trouver des exemples de pratiques sociales “différentes”

    Cela fait un petit temps maintenant que je suis consternée par l’indifférence avec laquelle la population occidentale laisse mourir les cultures locales et se penchent avec tendresse sur les cultures “des autres”. Je ne vois pas en quoi le top 50 représente aujourd’hui ma culture. Mon grand-père pouvait chanter tout le samedi soir avec ses amis des chansons qu’ils connaissaient par coeur et sans l’aide d’aucun karaoké. Il était bilingue (français / patois). Dans ma région, les Alpes, c’était les jeunes (garçons et filles) qui allaient garder les vaches (principalement) dans les alpages. Ils étaient livrés à eux-même pendant presque 3 mois à dormir dans des chalets éparpillés sans contrôle des adultes.

    Dans des vallées plus basses, j’ai entendu parler du maraichinage : au dessus de la salle de bal, il y a avait une pièce où un couple marié faisait régner un certain ordre parmi des couples qui s’étaient formés à la dernière danse plus ou moins et qui patientaient sur un banc pendant qu’un couple était couché dans un grand lit et pouvait s’explorer jusqu’à un certain point. Une façon de ne pas se marier idiotE et d’avoir déjà approché (au moins) un corps avant de s’engager plus avant.

    Dans les Pyrénées le rôle des 2 premiers enfants nés d’un couple était extrêmement codifiés mais les sexes étaient indifférents.

    Je trouve tjs étonnant que la société contemporaine pense qu’il y a toujours eu la famille nucléaire “maison/enfant/chien/berline familiale”. A mon humble avis, l’organisation de la famille clanique avec les maladies, les morts, les handicaps devaient laisser place à bon nombre d’arrangements entre les membres du clan.
    [ édité 10 Jun 2012 ]

  3. [ (sexe+affection+maison+enfants) <=> (Il+Elle*pour toujours) ]

    Ahhh !!! Il a mis une équation sur l’amour !!!!! 😉

    bon oui hein elle pointe des choses justes mais pourquoi fait-elle totalement abstraction des différents niveaux d’identités des personnes?

    – selon ce que j’essaie d’être à un niveau individuel

    – selon ce que mes parents/ma famille a fait de moi

    – selon ce que la société fait de moi en fonction de mes origines

    – selon ce que la société fait de moi en fonction de mon sexe / genre

    je vais résoudre cette équation tout à fait différemment.

  4. “Mon job, en quelque sorte, consiste à recenser et à décrire (pour mes collègues anthropologues) “

    Ah bon… tout ça pour ça alors? Juste pour donner de la lecture à ton jury ?

    Je te regardais évoluer au SP où nous étions ensemble et je pensais aux générations d’anthropologues qui, l’air de rien, déambulant dans les villages comptaient leurs pas pour déterminer des faits objectifs comme la distance entre les maisons, entre les points névralgiques du village ; observaient “qui touche qui”, “qui possède des attributs particuliers”.

    Bon bien sûr dans un SP en phase aiguë de câlins, la distance entre les gens est nettement réduite 😀 et en phase de “chenille poly” le toucher est joyeusement collectif…

  5. Ce qui est significatif pour moi de cette société, c’est son organisation patriarcale. J’entend par là des choix politiques et sociaux qui déterminent de façon autoritaire et contraignante pour tout le monde ce que doit être / ce que fait un homme et ce que doit être / ce que fait une femme. Cette société dispose qu’il n’y a que des hommes et des femmes et toute autre proposition de la nature est immédiatement assignée à l’un ou à l’autre.

    Selon ma grille de lecture, c’est les pratiques patriarcales (et maintenant capitalistes) qui mettent de la chair autour de l’équation.

    C’est ces pratiques qui déterminent

    le sexe : homme ou femme pas d’autres alternatives

    l’affection : une femme doit se dévouer à sa famille, un homme ne pleure pas

    maison : c’est l’homme qui paye, la femme qui valorise

    enfant : ils portent le nom du père, ils sont élevés par leur mère

    il*elle : pas de salut en dehors du couple

    “pour toujours” au besoin l’homme tue femmes et enfants pour que le “pour toujours” puisse continuer.

  6. Comment serait une société poly ?

    Déjà mon féminisme (identitaire ?) me pousse à vouloir la voir comme libératrice des genres. L’idée que notre goût pour la diversité donnera une société moins repliée sur elle-même et moins angoissée à vouloir mettre en place des structures contraignantes pour une uniformité sociale.

    Le simple fait de ne plus chercher à posséder/appartenir à une seule autre personne qui est priée d’être “la bonne” / “le bon” sous peine de crise existentielle me semble un pas dans cette direction.

    Il faudrait voir ce qu’on fait de la propriété des enfants, s’il continue d’être la propriété d’adultes tout puissants sur leur devenir où s’il y a moyen de la jouer plus collective.

    La question que je me pose c’est est-ce que le capitalisme y survivrait ? Est-ce que si l’on débarrasse le psychisme des gens de la notion de propriété sur une personne, est-ce que la notion de propriété privée (fondatrice du capitalisme) sur les choses arriverait à se maintenir?

    En sachant que les alternatives aux capitalismes reconnaissent le droit d’usage et que donc on peut tout à fait continuer à habiter une maison que l’on peut dire “sienne” tant qu’on l’habite.

    Finalement c’est “l’unique et sa propriété” qui nous empoisonnent :c’est au nom d’un dieu, d’une religion, d’une patrie, d’une “race”, d’un leader, d’un homme ou d’une femme que les pires atrocités sont commises.

    Comment cela se passerait si tout était au pluriel?
    [ édité 10 Jun 2012 ]

  7. Ce qui est merveilleux c’est que malgré des siècles de recherche forcenée d’uniformisation, il n’y a pas moyen de faire taire la diversité chez les humains.

    Quelle que soit la bannière, dès qu’on s’y intéresse de plus près, il faut reconnaître qu’il y a des courants et que derrière cette bannière tout le monde ne fait pas la même chose.

    Je ne connaissais pas la sociocratie, merci pour l’info. A vrai dire, je préfère parler d’autogestion, ça me semble plus transparent comme terme.

    Bon courage ! 🙂
    [ édité 10 Jun 2012 ]

  8. PS conseil de lecture sur comment une société peut être différente

    En Science-fiction

    Marion Zimmer Bradley et son cycle sur Ténébreuse (1er tome la planète aux vents folie”

    Ursula Le Guin “les dépossédés” ou “la main gauche de la nuit” (le roi decide de devenir une femme pour avoir un enfant avec son compagnon et de redevient un homme à l’issue de son congé maternité”

    Ian Banks et son cycle “La culture” (premier tome “l’homme des jeux”)

    Autre conseil de lecture, d’une anthropologue

    Paola Tabet “La grande arnaque, sexualité des femmes et échange économico-sexuel” paru chez L’Harmattan
    [ édité 10 Jun 2012 ]

  9. J’adore tout ce que tu proposes d’innovant, y compris entre les lignes…

    Aaah, Clémentine ! La jouer collective, oh oui oh oui ! Avec plein de décloisonnements, plein de clivages qui s’effriteraient, plein de nouveaux lits pour les rivières de nos modes de pensée !

  10. (sur le sujet du modèle de l’équation

    (sexe+affection+maison+enfants) = (Il+Elle*pour toujours) )

    1) Il y a une forte pression sociale à non seulement associer

    rapidement ces 4 éléments successivement (si on fait du sexe avec

    quelqu’un, il faut avoir des sentiments, si on a des sentiments il

    faut démarrer une relation de couple, si ça dure il faut habiter

    ensemble, et ensuite il faut se reproduire), mais surtout dans une

    relation de couple mono établie, il est très mal vu qu’un (ou plus)

    élément ne soit pas présent, et c’est souvent mal vu en tout premier

    par le partenaire.

    2) Il me semble aussi que le modèle (monogame) présenté comme l’idéal

    social inclut aussi d’avoir 2 personnes qui ont à peu près le même

    âge, et de contractualiser leur relation (mariage/pacs/union

    civile/etc). L’idéal vante aussi souvent le fait de s’unir à quelqu’un

    d’une classe sociale supérieure, mais ça ne peut par définition pas

    être symétrique.

  11. Elle en fait abstraction pour les raisons suivantes.

    Je suppose ici qu’il existe plusieurs façons d’être un homme ou une femme et plusieurs façons d’établir des relations affectives, sexuelles, domestiques ou familiales à l’intérieur même d’un seul modèle relationnel. Chacun, selon ses propres aspirations et son parcours, ayant une marge d’action qui lui est propre.

    Mais tant que la nature de ces quatre formes de relations (la première partie de la proposition) correspond à l’union monogame pérenne (la seconde partie de la proposition), elle correspond au modèle actuellement dominant dit “bourgeois”.

    Une fois que les formes relationnelles ne correspondent pas ou plus au couple monogame pérenne (à un des quatre niveaux de la 1e partie de la proposition, au moins, mais peut-être à d’autres aussi?), alors il ne s’agit plus de relations correspondantes au modèle dominant. Il s’agit d’autres modèles (par exemple, le couple gay, le couple divorcé, le polyamour, la polygamie…).

    Ainsi, effectivement, l’équation ne prend en compte les parcours individuels que de manière implicite. Une des raisons est que je présuppose sans doute que l’identité émerge de la relation et non l’inverse. C’est pourquoi je tente de distinguer des modèles de formes relationnelles et non des modèles identitaires.

    Une autre raison est que ce que je propose avec cette formule, c’est une modélisation de la monogamie dite “bourgeoise” (ce qui est différent d’une modélisation de l’amour).

    Finalement, le sens de ma proposition est d’identifier ce que “veut vraiment” le modèle bourgeois et ce que “veulent vraiment” les autres modèles. Qu’est-ce qui gêne le modèle dominant parmi les exemples du couple gay (fidèle), du couple hétéro (infidèle), du couple divorcé, du polyamoureux, du polygame, etc. ? C’est une des questions à laquelle je tente de répondre. Pour y voir clair, je tente de décomposer la dynamique des modèles et d’observer là où ça ‘clique’… et ainsi de percevoir à quels niveaux peuvent apparaître des divergences.

    Mais il est possible que j’aie oublié certains éléments qui seraient des paramètres communs à tous les modèles relationnels. Si tu vois (toi ou d’autres internautes) comment intégrer à la formule d’autres paramètres qui permettraient de mieux comprendre ce qui se passe collectivement, vas-y !

  12. Effectivement, l’idéal bourgeois de la famille (maison/enfant/chien/berline familiale) s’est imposé comme une référence. Si bien qu’il est commun de croire aujourd’hui que cette forme est naturelle. Mais elle ne l’est pas. Ni aux yeux de l’ethnographe, ni aux yeux de l’historien.

    L’histoire de l’Europe a vu les relations affectives, sexuelles, domestiques et familiales prendre des formes diverses. Si je choisis des exemples parmi des sociétés plus ou moins ‘exotiques’, c’est parce que mes connaissances personnelles en ethnologie sont plus riches qu’en histoire. Je suis donc plus à l’aise avec ce (premier) type de références. Et je rêve de pouvoir en dire autant en histoire.

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