BREL ET LES FEMMES : “J’ai une envie d’aimer qui est abominable !”

publié dans la revue TéléMOUSTIQUE, Hors-Série “Jacques BREL” – 2008

En amour comme dans La vie, Brel était un affamé. Il a aime les femmes avec passion mais aussi distance. Miche, Suzanne, Sylvie, Marianne, Maddly, elles ont toutes partagé un moment de la vie de Jacques. Chacune à sa manière.

S’il a chanté les femmes, Jacques Brel était avant tout un homme a hommes. Miche, qui fut son épouse durant vingt-huit ans, le confiait en 2003 : « L’amitié était sa grande affaire. D’ailleurs, la disparition de son grand ami Jojo, c’est pour moi le démarrage de son cancer. C’était la fin du monde. » Brel mettait l’amitié bien au-dessus de l’amour et ne s’en cachait pas. Toute sa vie, Brel a donc cherché les femmes autant qu’il les a fuies. Ainsi, Brel a aimé sans jamais totalement se donner. « Je n’aime pas beaucoup les femmes car elles sont un peu l’ennemi. Je ne suis pas misogyne mais je me méfie d’elles, profondément. Je me méfie d’elles parce que j’ai horreur de souffrir, d’avoir mal aux dents. et puis ça ne sert à rien… » Pour mieux se défendre, il attaquait. « Les femmes sont toujours en dessous de l’amour dont on rêve et comme je suis assez romantique et sentimental, je ne men cache pas du tout, la femme est un peu à côté de l’amour, à côté du rêve que j’ai. » Les mots claquaient durs et définitifs même si dans ses chansons, il avouait son incompréhension.

« Tais-toi donc Grand Jacques Que connais-tu de l’amour ? Des yeux bleus, des cheveux fous Tu n’en connais rien du tout. »

Et pourtant, les femmes ont habité ses chansons, Marieke, Mathilde, la Fanette, Clara ou Frida « qui est belle comme un soleil ». Parmi les nombreuses femmes qu’il a séduites, cinq semblent avoir vraiment comptées.

THERESE MICHIELSEN DITE MICHE

Née le 30 decembre 1926 a Etterbeek, elle est le grand amour de Brel. Elle fut sa femme durant vingt-huit ans, elle est la mère de ses trois filles et son éditrice depuis 1962. C’est à la Franche Cordée (mouvement de jeunesse catholique) qu’elle rencontre Brel. Ils se marient en 1950. Dès 1953, elle le laisse partir a Paris réaliser ses rêves et vivre… d’autres vies. « Comme j’étais au courant de tout, il n’y avait pas tromperie de sa part et il y avait acceptation de la mienne. Quand on accepte quelque chose, on ne gémit pas toute la journée. » Selon le biographe Olivier Todd, « le consentement de Miche est total, inexplicable, aberrant pour certains. Elle se plaint peu et il n’y a jamais de scènes. »

Pour Brel, toujours à batifoler et vivre sa vie, elle incarne « un avenir toujours possible, la stabilité et la persévérance. » Devant cette totale dévotion, la mère de Jacques disait de Miche : « Elle l’attend a la porte du garage et quand la voiture reviendra, elle sera là. » Ils vivront un amour que certains ne peuvent pas comprendre. Même pas eux, quelquefois.

Un soir de 1960, alors qu’il est en tournée, il lui écrit : « Tu mériterais surtout plus d’amour, ma Mie, alors que je n’arrive qu’a te donner toute la gentillesse et la tendresse dont je suis capable. Cent fois, j’ai attendu de toi une phrase me disant que tu aimerais mieux me quitter, mais peut-être es-tu moins malheureuse que je me l’imagine. Peut-être aussi n’as-tu pas comme moi ce double besoin de brûler en amour et qui tue certains hommes ? Mais peut-être sommes-nous maintenant au-dessus ou plutôt par-delà l’amour. Complices, gentils et tendres. Car enfin nous devrions nous détester et toi, je crois que tu m’aimes beaucoup, et moi, même si j’ai ce que les sots appellent de « coupables faiblesses », je ne fais jamais rien qu’en fonction de Toi et des nôtres. »

SUZANNE GABRIELLO

Sa première grande histoire d’amour après son arrivée à Paris. En 1955, les filles à papa font tournée commune avec Brel. Parmi elles, Suzanne Gabriello, actrice, chanteuse. Suzanne est aussi présentatrice à l’Olympia. D’un commun accord, leur aventure doit s’arrêter à la fin de la tournée estivale. Entre séparations et retrouvailles, c’est en 1961 que la rupture définitive survient. Suzanne a souvent dit que « Ne me quitte pas » (1959) avait été écrit pour elle. La version de Brel est différente. « C’est l’histoire d’un con et d’un raté. Ça n’a rien à voir avec une femme. » Suzanne est décédée en 1992.

SYLVIE RIVET

Elle fut la compagne de Jacques durant neuf ans, entre 1961 et 1970. Pendant ces années qui furent, pour Brel, les années de gloire, le chanteur mena une double vie. Avec Miche et les filles à Bruxelles, avec Sylvie à Paris. En 1961, attachée de presse chez Philips (la maison de disques de Brel), elle quitte Gainsbourg pour Jacques. Concernant cette liaison, le biographe Olivier Todd n’hésite pas à parler de « deuxième mariage ».

Brune aux yeux verts, belle, toujours discrète, mais possessive, il lui téléphone chaque soir lorsqu’il est en tournée et la convainc d’arrêter son travail pour être plus disponible. Brel s’installe chez elle à Paris et, pour la première fois, se pose la question du divorce. Au cours d’une discussion, Miche, l’épouse légitime, dira : « On s’aime trop, ça ne rime à rien. Tu es avec Sylvie, ça durera ce que ça durera. Nous, c’est pour la vie. » Après une dizaine d’années de vie commune, riche et orageuse, Brel part un matin de 1971, Sylvie est morte en 2002.

MARIANNE

Femme d’un grand sportif, elle est l’amie de Sylvie Rivet. Ils deviennent amants en 1970. Avec elle, Brel veut entretenir la passion et éviter les pièges de la routine qu’il déteste tant.

Marianne vit loin de Paris et cet éloignement rend leurs rencontres plus intenses. Pour Brel, Marianne incarne la liberté. Sur un tournage en1970, il lui écrit : “Tu sais, j’ai envie de faire plein de choses belles pour t’épater comme un gamin. Il faut que tu saches que tu es un moteur pour moi. C’est la première fois que j’aime en liberté, je veux dire que tu n’es pas mon esclave et je ne suis pas le tien.” En 1973, Brel se partage entre trois femmes, Miche, Maddly et Marianne. Cette dernière aurait peut-être pu prendre la mer à la place de Maddly Bamy, mais elle préfère rester près de son fils.

MADDLY BAMY

Elle est le dernier amour de Brel, sa doudou des Marquises. Originaire de Pointe-à-Pitre en Guadeloupe, elle débarque à Paris en 1953 et fréquente les milieux du show-biz et du cinéma. Son frère, Eric, écrit des musiques de chanson : pour Johnny Hallyday. En 1968, il lui présente Claude François dont elle devient une des Clodettes. Elle obtient également un rôle dans le film « Maddly » avec Alain Delon et Mireille Darc.

Elle emprunte le titre du film comme nom de scène. En décembre 1971, durant le tournage de « L’Aventure, c’est l’aventure », elle rencontre Brel. Après une relation épisodique de trois ans, elle embarque avec Jacques sur l’Askoy en 1974 direction les Marquises. Là-bas, elle veille sur lui jusqu’au bout. Après la mort de Jacques, elle multiplie les livres souvenirs (dont le premier « Tu leur diras »). Brel lui aurait demandé d’être sa mémoire et continuerait à lui parler au-delà de la mort. Un comportement qui a fini par agacer la famille Brel entrée en conflit avec Maddly.

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