Polyamour… Quand on aime on ne compte pas !

Par Grégory Escouflaire et paru dans le magasine “Ma Santé” du mois de mai 2008

Aimer plusieurs personnes à la fois, en toute franchise et sans souci de jalousie ? C’est possible, c’est le polyamour. Après des milliers d’années de monogamie instituée, l’amour à plusieurs tente une percée. L’Amour avec un grand A, non exclusif, non possessif, inconditionnel, universel ?

“Neuf personnes sur dix ne veulent même pas en entendre parler, et pourtant nous sommes tous des polyamoureux qui s’ignorent !” L’homme qui parle s’appelle Yves-Alexandre Thalmann, psychologue et auteur du livre “Vertus du polyamour. La magie des amours multiples”. Magique ? Selon lui, il n’y a pas photo : “si nous persistons à rester monogames, c’est que nous avons été conditionnés à agir ainsi ! L’exclusivité amoureuse n’a en fait rien de naturel : c’est juste une invention culturelle – d’ailleurs, 70% des mariages se terminent aujourd’hui par un divorce.

Nous aurait-on menti ? “La véritable utopie, c’est de penser qu’on peut rencontrer dans notre vie le partenaire idéal, qui serait l’amant parfait, le père parfait, l’ami parfait, le confident parfait. Avec le polyamour, c’est possible !” L’amour façon puzzle, sans les ennuis de la monogamie (monotonie) : une idée qu’elle est bonne ?

L’amour n’empêche pas l’amour

Aimer sans se limiter physiquement à une seule personne, voilà donc la vraie liberté : un amoureux ne chasse plus l’autre mais vient s’y ajouter, puisque “rares sont les individus à n’avoir aimé et désiré qu’une personne leur vie durant” – alors, pourquoi ne pas en profiter ? Tant qu’il y a respect, franchise, dialogue, et surtout aucun sentiment possessif, le polyamour semble une solution intéressante pour les obsédés du coup de foudre… “Mais ça ne veut pas dire que le polyamoureux a mieux compris l’amour que les autres ! C’est juste qu’il prend conscience, à un moment donné, qu’il est possible pour lui d’aimer plusieurs personnes à la fois. “Vivre l’amour inclusif, au grand jour, en toute liberté : d’accord, mais comment ?

Les valeurs du polyamour

Respect, communication, non possessivité : si cette règle de trois est censée s’appliquer à tous les adeptes du polyamour, encore faut-il savoir la respecter… “Le plus dur, c’est de ne pas éprouver de jalousie ! Mais une fois qu’on arrive à la vaincre pour de bon, c’est encore plus pur et intense…” Le polyamoureux doit “juste” se dire que l’autre n’est pas sa “propriété”, qu’il ne peut rien lui imposer. “Cette liberté totale est l’expression même du repect qu’ils se témoignent mutuellement”.

La fidélité, dans ce cas-ci, s’exprime dès lors sous le sceau de la franchise et de la prévenance envers chacun de ses partenaires, bref de “l’engagement par rapport à une parole donnée et à une promesse exprimée.” C’est une autre conception des rapports amoureux, où la richesse affective et relationnelle l’emporte sur l’exclusivité.” Il faut faire preuve d’une certaine humilité, puisqu’on ne représente pas tout pour l’autre…

Pratiquer l’ouverture

Autant de liberté n’empêche pas pour autant le polyamoureux de devoir respecter certains choix de vie pour vivre au mieux ses amours multiples… “On constate ainsi que beaucoup de polyamoureux optent pour une vie tout à fait classique, c’est-à-dire qu’ils privilégient un couple afin de structurer leur quotidien.” C’est le modèle “hiérarchique”, le plus répandu, où l’une des relations prime sur les autres… “Il faut bien se rendre compte que vivre plusieurs relations en même temps, sur le même pied d’égalité, demande beaucoup de temps… Et les polyamoureux ont peut-être un coeur qui se dilate, mais pas leur agenda !” On parle alors aussi de couple (ou de mariage) “ouvert” – même si les pourfendeurs du polyamour aiment jouer sur les mots et rejettent en bloc toute idée de “couple” et de “mariage”, trop restrictive et connotée culturellement…

Désamour des amours

Alors que notre société veut donner l’impression d’être toujours tolérante, le polyamour demeure pourtant tabou. Impossible, par exemple, de récolter pour cet article ne serait-ce qu’un témoignage : peur d’être incompris, stigmatisé, vilipendé… Le polyamour aime le pluriel, mais n’aime pas qu’on le juge. Infidèle, obsédé, immoral, égoïste, instable… Il en prend pour son grade, donc il préfère se taire. Et la franchise, l’honnêteté, l’importance d’assumer qui définissent la pratique ? “Être polyamoureux, c’est aussi accepter de se confronter à l’incompréhension… La plupart des gens n’arrivent même pas à se figurer la possibilité du polyamour : soit on aime une personne, soit on n’aime pas.

L’entre-deux n’est pas concevable.” Ce n’est donc pas demain la veille que le polyamour sortira de l’ornière… Malgré tous les espoirs de Yves-Alexandre Thalmann : “Il suffit de voir le nombre de divorces et de familles recomposées – ce qui tend à prouver que l’équation “amour=mariage=reproduction” a du plomb dans l’aile ! Je suis persuadé que d’autres modes de vie sont à imaginer… En quoi ce serait mieux d’être monoamoureux que polyamoureux ?” Une bonne question, qui, finalement, ne nous regarde pas !

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